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  • L'Islam au musée du Louvre

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    La presse a largement traité cette semaine de l'ouverture des nouvelles salles du musée du Louvre consacrées (principalement mais pas uniquement) aux arts de l'Islam. Il faut dire que la question de l'Islam est régulièrement depuis les événements du 11-Septembre dans l'oeil du cyclone de l'actualité la plus saillante. L'ouverture de ce nouveau département au musée du Louvre fait d'ailleurs écho à la rénovation des salles d'art islamique du Victoria & Albert Museum (2006), du Metropolitan Museum de New York (2011), sans parler de la construction et de l'ouverture du monumental musée d'art islamique de Doha en 2007 (Qatar). Au moment où le monde musulman s'échauffe une nouvelle fois, entre la destruction des mausolées de Tombouctou cet été et les violences de ces derniers jours, on ne pouvait trouver meilleur contraste, plus beau contre-message. L'héritage de l'art est la face lumineuse de toutes les cultures. L'inauguration ce mois-ci des salles du Louvre tombe ainsi à point nommé. L'enjeu était rien moins qu'anodin, le résultat devait être à la hauteur des enjeux. Et l'on se doit de dire que ces nouvelles salles consacrées aux arts de l'Islam sont enthousiasmantes et constituent désormais pour le Louvre un élément d'intérêt tout à fait remarquable.

    Ces nouveaux espaces se déploient au centre de la Cour Visconti (aile Denon), au niveau du rez-de-cour et sur un niveau inférieur. Le principe architectural qui prévaut à la construction extérieure dans la cour est audacieux et saisissant. Avec cette nappe souple qui ondule, ces piliers penchés qui la soutiennent, on pense immédiatement à une tente dressée. C'est une tente de bédouins plantée au milieu de la cour d'un palais. Il fallait oser. C'est parfaitement réussi mais assez culotté, avouons-le !

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    L'accès à cet espace se fait des différents côtés au travers de portes qui sont comme des tunnels un peu sombres, en béton noir et lisse. Ces passages forment des articulations assez fortes, presque dures mais qui permettent une découverte spectaculaire des nouveaux espaces dans la cour. L'espace de l'Islam est à la fois clairement distinct des autres salles du musée mais également totalement ouvert sur les autres cultures de la Méditerranée : la Grèce antique, l'Egypte copte. 

    Une fois entré "sous la tente", on est frappé par la grande transparence des verres et la totale visibilité de l'espace environnant. L'emprise au sol de la cour est extrêmement subtile et on a l'impression d'être en extérieur, simplement sous le voile de la nappe. On accède au niveau inférieur et principal par un escalier du même béton noir et lisse, et l'on découvre en surplomb l'immense salle souterraine. C'est une impressionnante collection au déploiement vertigineux, presque difficile à saisir dans son parcours. Mais est-ce le but ? La visite de cette salle est aussi le plaisir d'une déambulation savante au milieu de milliers d'objets admirables.

    Dans ce foisonnement, une chose nous a semblé particulièrement intéressante, c'est la remise en contexte des arts de l'Islam dans une géographie et dans une histoire, c'est-à-dire au sein de l'Orient méditerranéen, et non comme un art solitaire, sans porosité, isolé dans sa pureté fantasmée. Ainsi, juste aux abords, on découvre une mosaïque antique représentant une amazonomachie et des témoignages de l'art chrétien avec un (superbe) pavement d'église et des mosaïques.

     

    Soulignons aussi le bel effort de médiation, en direction des visiteurs curieux : cartes animées, vidéos, bornes interactives.

    Mais l'ouverture de ces nouvelles salles au musée du Louvre va au-delà des seules frontières de l'art de l'Islam puisque l'on découvre aussi un ensemble plus large de salles parcourant tout l'orient méditerranéen jusqu'à l'Egypte copte. Ces nouvelles salles sont lumineuses et la présentation des œuvres est irréprochable. On retrouve en outre avec plaisir l'accès à l'église de Baouit. 

     Tout n'est pas réussi cependant dans ces nouveaux espaces et il y a des parties étrangement faibles. Ainsi la mezzanine, sombre et bas de plafond, est un peu ratée. L'articulation des deux sections dévolues à l'Orient méditerranéen avec la contrainte d'un passage souterrain est également peu heureuse. Beaucoup de visiteurs sont perdus.

     

    La cour Lefuel adjacente a été restaurée et, le jour du vernissage, on pouvait s'y promener. Il était très plaisant de gravir l'escalier à pente douce destiné aux chevaux de Napoléon III.

     

    Ces nouvelles salles sont donc l'occasion de nous réjouir de l'embellissement du Louvre. Nous serions heureux si la peinture occidentale pouvait recevoir une telle attention...

     

  • Canaletto et Guardi au musée Jacquemart-André

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    Canaletto (Antonio Canal, dit), Le Grand Canal et l'entrée au Cannaregio, huile sur toile, 46 X 78,4 cm, supplied by Royal Collection Trust - © HM Queen Elizabeth II 2012

     

    Le musée Jacquemart-André présente en ses murs depuis la semaine dernière une exposition très réussie sur la vedutta vénitienne au XVIIIe siècle autour des figures de Canaletto et de Francesco Guardi. Très réussie en dépit de son sujet serait-on presque tenté de dire. En effet, cette peinture, par définition assez répétitive, pouvait faire craindre quelque chose de très ennuyeux. On a l'impression de déjà bien la connaître, on en voit dans tous les musées du monde, et d'ailleurs on ne la regarde même plus.

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    Francesco Guardi, Le Canale di Cannaregio, avec le Palazzo Surian-Bellotto, l'ambassade de France, 49,5 x 77,5 cm, huile sur toile, The Frick Collection, New York - © The Frick Collection


    Or la clarté du propos, l'admirable sélection des tableaux, l'intelligence de la démonstration, font de cette présentation une belle réussite. Servie par l'élégante scénographie d'Hubert Le Gall, l'exposition ne lasse jamais, et les espaces un peu difficiles du musée Jacquemart-André n'ont jamais paru aussi bien proportionnés.

    L'effort de médiation a été particulièrement poussé. Le visiteur reçoit gracieusement à son arrivée un petit livret très complet et très bien conçu. Le site internet de l'exposition (à ne pas confondre avec la section du site internet du musée consacrée à l'exposition) est particulièrement riche en contenu. Il permet de surcroît de télécharger des applications pédagogiques pour smartphones. Bienvenue au 21e siècle.

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    Canaletto, La Régate sur le Grand Canal, vers 1732, Huile sur toile, 149,8 x 218,4 cm  © The Bowes Museum, Barnard Castle, County Durham, England